Nous vous présentons notre nouvelle sélection hebdomadaire, qui explore l'exposition Roger Catherineau ou l'irréalisme en images et avec les mots de son commissaire Éric Rémy.
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Découverte de la photographie
À 20 ans, au sortir de la guerre, Roger Catherineau termine l’École Normale Supérieure de l’enseignement Technique de Paris après des études en arts appliqués. Bien qu’il espérât rester aux environs de Paris, il est nommé à Lille et obtient après concours une chaire à l’École des Beaux-Arts.
Avant tout dessinateur, sculpteur et intéressé par la danse et le mime, il arrive à la photographie qui devient une échappatoire dans sa nouvelle vie d’exilé, loin du cercle parisien de ses amis artistes rencontré durant ses études. Dans son portrait de Roger Catherineau1, le journaliste Michel Zyka souligne que par sa formation, sa curiosité et ses fréquentations, il évolue dans un cercle d’amis peintres, sculpteurs et danseurs et qu’ainsi « Catherineau s’initiera tour à tour à la sculpture et à la danse et qu’il s‘apercevra combien les arts plastiques, loin de s’isoler, se complètent dans une harmonie merveilleuse ».
Dans son appartement lillois transformé en atelier, il s’achète un Leica qui remplace bientôt son carnet de croquis, puis, insatisfait des tirages du laboratoire, il s’équipe du matériel nécessaire au développement. Il se passionne alors pour cette alchimie qui le ramène à la matérialité de la création, là où la prise de vue photographique seule s’en éloigne. Il découvre les miracles du photogramme en oubliant une paire de ciseaux sur le papier, « point de départ enthousiaste de toutes les recherches plastiques qui suivront… » .
1.Interview de Roger Catherineau in Ciné photo magazine N °58 avril 1956 p. 2
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Photographisme et photogrammes
En créateur éclairé et exigent, Roger Catherineau va durant une quinzaine d’années travailler la matière argentique comme un peintre sa toile. « Son objectif est pour lui un instrument d’expression identique au crayon du dessinateur ou au pinceau du peintre ». Il considère « la photographie comme art à part entière, débarrassé des impératifs de la reproduction ou de l’interprétation du réel ». Dans la production de Roger Catherineau, on parle d’ailleurs plus aisément de créations photographiques que de photographies.
Dans une plaquette présentant son travail, il défend l’idée que la photographie prend « place parmi les autres moyens d’expression : dessin, gravure, sculpture peinture... pour créer des images. » Il résume ainsi sa vision : la photographie est créatrice d’image, elle ne les capte pas.
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Subjektive fotografie
La Subjektive Fotografie [photographie subjective] a été fondée par Otto Steinert, un membre du groupe fotoform, au début des années 1950. Elle se concevait comme une photographie explicitement artistique, fondée sur la pratique expérimentale du médium.
Opposée à la photographie comme reproduction objective de la réalité, la Subjektive Fotografie privilégie les possibilités d'une interprétation picturale où l'imagination est sollicitée. Elle s'exprime essentiellement en noir et blanc et à travers des formes abstraites, des sujets graphiques ou des compositions surréalistes. Les tirages sont généralement contrastés et soulignent des découpes radicales et des jeux d'ombre et de lumière.
Après la Seconde Guerre mondiale, la Subjektive Fotografie souhaite rendre à la photographie sa légitimité artistique, qu'elle aurait perdu au profit de la photographie documentaire. En 1951, le groupe fotoform organise la première exposition de Subjektive Fotografie à Sarrebruck, suivie par deux éditions suivantes ne 1954/55 et 1958.
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Reconnu par un premier prix à Saarbrücken dans l’exposition de Subjektive Fotografie II, Roger Catherineau expose régulièrement dans différents salons avec des bonheurs aléatoires : les jurés de sélection ne retiennent qu’une ou deux de ses photographies, déroutés par leur modernité si éloignée « des couchers de soleil, des nénuphars ou des groupes de clochards » qui peuplaient encore les sélections.
« La photographie est une écriture de lumière, selon la définition propre. S’il est permis à tous d’écrire, y a-t-il pour autant beaucoup d’écrivains véritables ? Puisse la création photographique pure être une Poésie pouvant se passer du Verbe ! »
Brochure Un moyen d’expression plastique : la photographie. Roger Catherineau, nd, (circa 1958-1960)
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Le portrait réinventé
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Déréaliser
Pour Catherineau, le travail se fait dans la chambre noire, c’est une « obligation d’effectuer soi-même tous les travaux de laboratoire », car cela « aide à pénétrer plus avant le fantastique du réel du Grand Meaulnes ». Pour lui, les frontières s’estompent : les sujets sont à la fois animaux, végétaux — le cœur de son œuvre —, matières organiques, objets industriels, et ainsi « l’homme rejoint le verre, la peau devient fibre »*.
*Brochure Un moyen d’expression plastique : la photographie. Roger Catherineau, nd, (circa 1958-1960)
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